Au cœur de la nature blessée

Allary éditions
Septembre 2022, repris en Champs-Flammarion. 
234 p.

ISBN : 978-2370734211

Commander

L’extrait


« Voici un geste que nous avons tous fait, et plutôt souvent. En promenade dans un coin de nature qui nous enchante, nous nous apprêtons à prendre une photographie pour en conserver un souvenir ou partager nos impressions avec nos amis, mais, malheureusement, il y a un énorme pylône sur la droite. Qu’à cela ne tienne, nous cadrons de façon à ce que le pylône n’apparaisse pas sur la photo. Cet évitement d’un détail déplaisant nous paraît justifié par notre désir d’obte- nir la meilleure photographie possible. Cependant, si l’on y réfléchit, ce geste n’est peut-être pas si innocent, en tout cas il n’est pas dépourvu de conséquences. Une telle falsification de la réalité n’est pas, en soi, très différente des méthodes des propagandistes de l’ère soviétique, qui découpaient ou retouchaient les archives lorsqu’un membre du Parti com- muniste était tombé en disgrâce. Obnubilés par notre quête d’harmonie, nous faisons subir aux représentations de notre environnement une purge qui a, l’air de rien, la dimension d’un trucage systématique, et qui finit par nous empêcher de voir le monde tel qu’il est. »

Le thème


Incendies, tempêtes, canicules : ces dernières années ont permis à chacun de prendre conscience que nous vivons au cœur d’une nature transformée par l’activité humaine, une nature blessée.

Il est donc urgent de ne plus la fantasmer. La vision d’une nature faite de grands espaces et de forêts primaires où se croisent des animaux sauvages est devenue obsolète. La pollution, la perte de la biodiversité et le réchauffement climatique ont impacté tous les écosystèmes. À l’ère de l’Anthropocène, en dehors de quelques réserves naturelles, il n’existe plus de nature vierge. Bien des paysages de notre enfance ont d’ailleurs disparu.

Cet essai ose affronter les questions qui dérangent, et qu’il n’est plus possible d’esquiver : à l’heure du réchauffement climatique, quels liens sensoriels et émotionnels pouvons-nous tisser avec notre environnement ? Quel type de plaisir et d’émerveillement pouvons-nous encore y trouver ? Pourra-t-on ressusciter les paysages disparus ?

En nous faisant voyager de la mer Baltique au lac Titicaca, en passant par les collines de Bourgogne, Taïwan ou la passe de Tiputa, Alexandre Lacroix nous ouvre les yeux sur la nature que nous habitons désormais. Une lucidité d’autant plus importante qu’elle ne conduit ni à la tristesse, ni à l’abattement, mais à l’engagement.

Revue de presse

Figaro Madame

« La terre souffre, le climat s’emballe, mais ne baissons pas les bras, chassons désespoir et abattement grâce à cet essai du philosophe Alexandre Lacroix, qui nous apprend à voir les paysages du XXIe siècle, pour mieux s’engager sur la voie du réel sans idéaliser la nature. »

Arnaud Gonzague, ÉcoloObs, 13 octobre 2022

« Bien sûr, reconnaît Lacroix, un paysage anthropisé est ressenti par nous comme une « zone d‘inconfort », un lieu gâché par les errements de notre civilisation. Pourtant, « nous gagnons tout de même au change […] en acceptant de vivre au cœur de la nature blessée : c’est une condition pour retrouver le contact avec le réel ». Un réel abîmé, certes, mais qui est préférable à la tour d’ivoire de l’esthète. Car en matière de paysage, un tiens vaut mieux que deux tu ne l’as plus. »